Il fut un temps où les maghrébins entraient en Europe comme on entre dans un moulin.  Point de visa ! Non pas par laxisme de la part des polices des frontières européennes en général et de celle de la France en particulier (pays qui entretenait des relations politiques à la limite du sadomasochisme avec la plupart des pays maghrébins; qu’il avait dominés, et… opprimés, plusieurs décennies de suite et qui venaient, tous, et tout juste, de se débarrasser du joug colonial) mais parce que le travail dont les nationaux ne voulaient  pas ou n’arrivaient pas à en venir à bout abondait durant ces années 1960 et 1970 dans toute l’Europe !

Je fus étudiant en ces temps-ci à Paris et je fus témoin de cette concentration d’illettrés maghrébins (mineurs, éboueurs ou ouvriers dans les usines de construction automobile) confinés dans des baraquements d’ouvriers, ou des foyers, dans les quartiers de banlieue où les étudiants que nous étions allaient donner bénévolement des cours d’alphabétisation.

Les temps vont par la suite changer, la mécanisation va rendre les travaux repoussants plus attrayants et la robotisation va conquérir les usines; mettant ces immigrés sur la touche.

Le mythe du retour

Ironie du sort, des surenchères politico-politiciennes ont permis à ces immigrés (supposés être temporaires) de ramener leurs familles et de s’installer provisoirement en attendant un retour au pays d’origine, dans des cités érigées par la République et qui vont devenir par la suite la source d’un tas de problèmes, amenant un président français à traiter une partie de ses concitoyens de Racaille.

En attendant ce retour mythique de ces indésirables, mépris, racisme, voire haine s’affichaient impunément envers ces hères dont les congénères firent le coup de feu libérateur contre l’ordre colonial, et qui finirent contre toute logique (la logique suprématiste coloniale) de gagner l’indépendance.

Une petite anecdote en ce sens : l’un de mes condisciples, qui est allé visiter un de ses cousins, demanda à un habitant du quartier où se trouve le foyer SONACOTRA (Société nationale de construction de logement de travailleurs). Et le français de lui répondre : Tu n’as qu’à suivre les crachats sur le trottoir. Ils t’y conduiront tout droit.  Et le français de cracher de côté.

Au temps où les islamistes n’étaient pas encore inventés

Par ailleurs, je fus aussi témoin de tout cet encadrement policier, aussi bien de la part des pays d’accueil que de celui des pays d’origine de ce ‘’prolétariat’’, pépinière révolutionnaire potentielle, tant convoitée durant ces temps-ci, aussi bien par les marxistes, que par les léninistes ou par tous les extrémistes du Monde…    Extrémistes dont ne faisaient pas encore partie les islamistes… car (et probablement parce que) le mur de Berlin n’était pas encore tombé avec toute sa symbolique… Mais parce qu’on avait encore besoin de l’islam pour chasser l’ex URSS de l’Afghanistan.

Ce fut le temps où les médias occidentaux chérissaient les adorables Moudjahidin afghans, auxquels les services de renseignement américains ont confiés de joujoux offensifs comme les  Stringers et qui sont devenus par la suite les exécrables Talibans; une fois les russes chassés de l’Afghanistan et le mur de Berlin tombé.

Quelle relation avec le Canada ?

Aucune. Car, et n’en déplaise à certains fomenteurs de trouble, vouloir comparer l’immigration musulmane, vers le Canada à celle s’étant établie en Europe, relèverait plutôt de la Paranoïa. En effet, le Canada n’a jamais occupé de pays, ni maghrébins, ni musulmans, ni athées… Et le Canada n’a jamais exploité de travailleurs venant de pays colonisés.

Rappeler ces faits historiques n’est ni une provocation de notre part ni une adhésion à cette fameuse ‘’Théorie du complot’’ (à laquelle nous n’avions jamais cru et qu’il suffit juste d’évoquer par certains manipulateurs de l’opinion publique pour étouffer dans l’œuf toute quête de la vérité). Les rappeler, c’est juste pour attirer l’attention sur le fait que les musulmans, dans leur très grande majorité, seraient plus victimes de manipulations que fomenteurs de trouble .

Mettre les conflits contemporains dans leur vrai contexte

Rappeler ces faits, c’est juste pour inviter les personnes soucieuses de promouvoir le vivre-ensemble de mettre les conflits contemporains dans leur vrai contexte . Et si les musulmans d‘Europe auraient une histoire tumultueuse, et éventuellement des comptes personnels à régler avec des pays Européens, il n’en va absolument pas de même avec des pays comme le Canada avec qui ils ont beaucoup plus de similitudes que de divergence.

Talleyrand, ce diplomate, évêque et Homme d’état français (1754 – 1838) affirmait que la politique  n’est rien d’autre qu’une façon « d’agiter le peuple avant de s’en servir »… exactement comme recommanderaient les pharmaciens d’agiter un médicament avant de le boire… Sauf que dans le cas de l’agitation politique c’est souvent pour tuer que pour faire vivre; c’est souvent pour semer la haine en vue d’atteindre des buts inavoués et lugubres que de promouvoir la concorde!

Les néo-québécois de confession musulmane sont venus ici pour fuir les intrigues politiques, pour vivre en Paix et pour assurer à leurs progéniture un avenir meilleur… Force est de constater hélas que le Mal les a dans le collimateur et qu’il a traversé à la nage l’Atlantique pour les persécuter.

Des forces malsaines (de part et d’autre de la barrière de l’incompréhension) agitent l’islam pour mieux s’en servir en vue de créer un fossé entre nous et nos autres concitoyens. Baisser les bras, c’est concéder la victoire.

Non. Nous ne baisserons pas les bras !

Abderrahman El Fouladi pour Maghreb Canada Express, page 3, Vol. XVI, N° 1 et 2, Janvier-Février 2018

Pour lire  l’édition du Janvier-Février 2018, cliquer sur l’image:

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