Décidément le coronavirus est un mal pour un bien en ce qui concerne certaines catégories sociales en France par exemple. Invisibles, il y a quelques mois, elles deviennent d’un coup médiatiques et on les applaudit tous les soirs à 20H ! Il s’agit bien-sûr des éboueurs, des routiers, des caissières, et principalement du personnel de santé.

Les médecins étrangers font un travail dont les médecins français ne veulent pas.

Ces médecins étrangers à qui la France rechignait naguère à reconnaitre leurs diplômes, deviennent tout d’un coup des héros. Ils sont en première ligne.  Ils me font penser aux indigènes qu’on utilisait pendant la deuxième guerre mondiale comme la chair à canons.

Comme les indigènes qui touchaient une pension de guerre moitié moins élevée que celle des combattants français, ils sont entre 4 000 et 5 000 à faire tourner les services des urgences ou de réanimation dans les hôpitaux publics, mais avec des salaires très inférieurs à ceux de leurs homologues diplômés en France.

Ils sont majoritairement originaires du Maghreb, et surtout répartis dans les établissements publics. Ce sont ces internes ou praticiens dits associés, qui enchaînent les gardes la nuit et le week-end, font tourner les urgences mais aussi les services de réanimation, de radiologie ou de psychiatrie. Bref, des rouages essentiels dans le système de soins français.

« Ils sont en première ligne dans tous les services où il y a une énorme pénibilité du travail », résume Hocine Saal, vice-président du syndicat (Snpadhue) qui les représente. « En gros, ils font le boulot que les médecins français ne veulent pas faire, mais sans la reconnaissance ni la rémunération, » dit plus crûment Mathias Wargon.

Et de poursuivre : « Tous les soirs, on donne la claque pour remercier les soignants, on parle de revaloriser leurs salaires, de primes jusqu’à 1 500 euros, (comme annoncé par le gouvernement le 15 avril, dernier) de Légion d’honneur… Mais, ces gens-là, on les oublie. »

Pas certain, en effet, que le chef de l’État pensait à ce bataillon de médecins étrangers, lorsqu’il assurait, le 13 avril dernier, lors de son intervention télévisée : « Il nous faudra nous rappeler aussi que notre pays, aujourd’hui, tient tout entier sur des femmes et des hommes que nos économies reconnaissent et rémunèrent si mal ».

Parcours du combattant

Comme on peut le lire  dans le journal « Le Monde » du 16/04/2020, un interne Padhue touche 1 300 euros net par mois et 100 euros la garde, rappelle le chef des urgences de l’hôpital de Saint-Denis, quand un jeune médecin diplômé en France commence sa carrière à 3 900 euros (et 200 euros la garde). « Il y a un vrai prolétariat organisé dans les hôpitaux, résultat d’une gestion malthusienne à l’œuvre depuis trente ans », dénonce Amine Benyamina. Chef du service psychiatrie-addictologie de l’hôpital Paul-Brousse, à Villejuif (Val-de-Marne), ce Franco-Algérien est à l’initiative d’une pétition (qui avait reçu plus de 25 000 signatures le 7 mai dernier) et d’une lettre ouverte adressée à Edouard Philippe le 5 avril dernier visant à obtenir « l’intégration des médecins étrangers engagés dans la lutte contre la pandémie ».

Mêmes risques, même statut

Une lettre ouverte au Premier ministre ainsi qu’une pétition ont été publiées début avril pour demander l’intégration « pleine et entière » des médecins à diplôme étranger qui luttent contre la pandémie.

Ces derniers « méritent la reconnaissance de la République pour leur engagement en première ligne, alors que leur salaire est souvent dérisoire par rapport à ceux de leurs collègues, et qu’ils risquent de retourner à la précarité et à l’incertitude sur leur avenir en France une fois la crise surmontée. Ils sont à nos côtés dans une période où tous les soignants risquent leur vie tous les jours au service de notre pays », souligne la lettre ouverte.

L’un des premiers signataires de la lettre, Mathias Wargon, chef de service des urgences du centre hospitalier de Saint-Denis urgences, a expliqué au micro de RTL qu’il y avait deux types de médecins étrangers : 1. Les « stagiaires associés qui sont des internes, mais en réalité sont des médecins dans leurs pays d’origine » qui gagnent 1500 euros en moyenne et 2. les « praticiens associés »,  dont certains ont passé le contrôle de connaissances, sont quant à eux payés entre « 2000 et 2600 euros », contre 5800 en moyenne pour un médecin hospitalier français, selon RTL.

Cette pétition, qui avait été signée par 35 000 personnes au 17 avril, intervient alors que la nouvelle loi santé prévoit de remplacer l’examen couperet par une sélection sur dossier, qui prendrait en compte le diplôme initial et le parcours professionnel – actes médicaux déjà réalisés, appréciations des chefs de service, etc. Le décret d’application n’a cependant toujours pas été publié.

Un parcours de combattant

Il y a une dizaine d’années, j’ai rendu visite à un ami malade à l’hôpital Saint-Joseph de Paris. J’ai fait la connaissance d’une infirmière algérienne qui a eu son diplôme de médecin à Alger. On lui a demandé de passer le concours, il y a deux cent ou trois cent candidats qui se présentent à ce concours pour quelques places de disponibles. Faute de temps et d’argent elle a renoncé au concours et a continué de travailler comme infirmière dans cet hôpital

Le combat de ces praticiens précaires est soutenu par de nombreux médecins français, ainsi que d’anciens Padhue, qui ont fini par être pleinement titularisés.

« J’ai vécu ce qu’ils ont vécu et c’est une véritable injustice« , explique le docteur Widad Abdi, qui exerce au service de réanimation monté dans l’urgence à la clinique de l’Estrée à Stains [Seine-Saint-Denis]. Le médecin anesthésiste-réanimateur, qui a été titularisée en 2011, est désormais secrétaire-général du SNPADHUE, pour soutenir leurs revendications.

Elle rajoute : « Mon métier n’a pas changé quand je fus titularisée, mais c’est une reconnaissance de l’investissement et du travail effectué […]. C’est comme sortir en plein jour, passer de l’illégalité à la légalité. »

Didier Raoult et son équipe de chercheurs étrangers

Emmanuel Macron, a rendu visite au  professeur Didier Raoult qui appelle depuis quelques semaines à l’usage généralisé de l’hydrox chloroquine pour combattre l’épidémie.

Dans la foulée, le Président, accompagné du professeur Didier Raoult, a eu quelques échanges avec des chercheurs en virologie et épidémiologie, pour la plupart des Africains et des orientaux.

«Vous êtes de quels pays ? » avait demandé le président.

«Burkinabé, Sénégalais, Tunisiens, Maliens, Marocains, Algériens et Libanais.. » ont répondu les chercheurs .

Oui le Coronavirus a montré aux Français que les noirs et les Arabes ne sont pas tous des terroristes, ou des voleurs de mobylettes. C’est juste que ces chercheurs, ces ingénieurs, ces informaticiens, ces professeurs, qui font tourner la France n’intéressent pas les médias.

Ce qui est du pain béni pour les incitateurs à la haine contre l’étranger,  comme Zemmour, Finkielkraut entre autres.

Comme le disait James Baldwin : « Ce n’est pas tout ce que vous avez pu me faire qui vous menace. C’est tout ce que vous avez fait à vous-même qui vous menace »

Par Mustapha Bouhaddar pour Maghreb Canada Express, (Édition électronique) Vol. XVIII, N°05 , page 3, Mai 2020.

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